dimanche 30 octobre 2011

Séminaire du mercredi 26 octobre 2011 sur le thème : "Justice, Sciences, crimes et peines au XXème siècle"

J'ai été convié par mon ami Jean-Claude VIMONT à animer un séminaire organisé par le Département d'Histoire; mon intervention a été fimée en deux parties par le service audiovisuel de l'Université de ROUEN.


Je remercie Jean Claude VIMONT de m'avoir autorisé à publier les liens ci dessous:


1ère partie:
http://www.univ-rouen.fr/audio/player.php?h=400&l=800&vid=http%3A%2F%2Fwww.univ-rouen.fr%2Faudio%2Fsciencepeine%2F2012%2Fprison01.mp4 

ème partie :
http://www.univ-rouen.fr/audio/player.php?h=400&l=800&vid=http%3A%2F%2Fwww.univ-rouen.fr%2Faudio%2Fsciencepeine%2F2012%2Fprison02.mp4 

Radio Campus Paris/GENEPI : messages radio aux prisonniers‏



Sur Radio Campus Paris, tous les premier et troisième samedis du mois à partir du samedi 5 novembre, vous pouvez appeler les étudiants bénévoles du GENEPI entre 10h30 et 11H30 pour adresser un message radiophonique à l'un(e) de vos proches incarcéré(e) dans l'une des prisons d'Ile de France : Bois d'Arcy, Fleury-Merogis, Fresnes, Meaux, Melun, Nanterre, Osny, Paris la Santé, Poissy, Versailles ou Villepinte. Pour ce faire : 01.49.96.65.37.       

Les messages seront diffusés sur Radio Campus Paris (93.9FM) entre 17h30 et 18h. Vous pouvez aussi nous les faire parvenir par mail à l'adresse lesvoixcaptives@gmail.com, ou à la Maison des Initiatives Etudiantes, Radio Campus Paris - Émission "Ici l'ombre, les voix captives", 50, rue des Tournelles, 75003 Paris. 


vendredi 28 octobre 2011

Tristes statistiques : le nombre de suicides en prison depuis le début de l'année 2011 ; heureusement que l'Association BAN PUBLIC tient les comptes à jour, la pénitentiaire ne communiquant plus du tout sur ce fléau


http://prison.eu.org/spip.php?page=rubrique&id_rubrique=69&annee=2011

quelques données sur l'immobilier pénitentiaire et la "population pénale" pour réactualiser nos tablettes!‏



Données arrêtées au 31 août 2011

Au 1er septembre 2011, il y a 189 établissements pénitentiaires
99 maisons d'arrêt
25 centres de détention
11 centres de semi-liberté
6 maisons centrales
6 établissements pour mineurs
42 centres pénitentiaires

Les quartiers

1 E.P.S.N.F.  (Etablissement Public de Santé National de FRESNES)
42 quartiers maison d'arrêt
37 quartiers centre de détention
5 quartiers maison centrale
7 quartiers de semi-liberté
6 quartiers pour peines aménagées
1 quartier centre pénitentiaire

Gestion publique/gestion déléguée

Au 1er septembre 2011, 
139 établissements à gestion publique, hébergeant 36 191 détenus, avec un taux moyen d'occupation de 118,77%
50 établissements à gestion déléguée, hébergeant 27 411 détenus, avec un taux moyen d'occupation de 105,09%

Taux de sur-encellulement individuel

Au 1er janvier 2011,
48 354 cellules
58 165 places
60 544 détenus
66 975 personnes écrouées

Selon le "scénario moyen DAP/PMJ basé sur une croissance modérée de la population pénale":
Au 1er janvier 2012,
49 364 cellules
59 062 places
59 062 détenus
70 837 personnes écrouées
Au 1er janvier 2013,
50 567 cellules
60 420 places
59 930 détenus
72 699 personnes écrouées

Au 1er janvier 2014,
50 628 cellules
60 164 places
60 764 détenus
74 562 personnes écrouées
Au 1er janvier 2015,
52 401 cellules
62 155 places
61 562 détenus
76 425 personnes écrouées
Au 1er janvier 2016,
56 248 cellules
64 381 places
62 325 détenus
78 287 personnes écrouées

Au 1er janvier 2017,
58 233 cellules
66 231 places
63 054 détenus
80 150 personnes écrouées

Les syndicats pénitentiaires interpellent le ministre en visite à Fleury Mérogis

http://www.leparisien.fr/espace-premium/essonne-91/les-syndicats-penitentiaires-interpellent-le-ministre-en-visite-28-10-2011-1689642.php

Signez vite la pétition afin d'éviter qu'HANK SKINNER soit assassiné mercredi prochain par l'Etat du Texas

http://www.change.org/petitions/in-the-interest-of-justice-grant-dna-testing-to-hank-skinner#

Nouvelles cellules à Fleury-Mérogis



Une meilleure hygiène, moins de jets de projectile dans la cour, et surtout des douches individuelles dans les cellules. La maison d'arrêt de Fleury-Mérogis (Essonne), la plus grande d'Europe, est en pleine rénovation, a constaté le ministre de la Justice, Michel Mercier, venu hier contrôler l'avancée des travaux et rencontrer les syndicats de surveillants de prison de l'établissement. Sur les cinq bâtiments que composent la maison d'arrêt des hommes, deux d'entre eux ont été rénovés. En février prochain, un troisième sera livré. En tout, la capacité d'accueil sera de 3 574 places - contre 2 800 aujourd'hui. « On ne fait pas de miracle sur 9 m2. Mais on a quand même réussi à y mettre des douches individuelles et à refaire les fenêtres », concède Paul Louchouarn, le directeur de la prison de Fleury. Le projet de rénovation concerne aussi le centre des jeunes détenus ainsi que la maison d'arrêt des femmes, qui devraient être achevés en 2018. Ojectifs ? Améliorer les conditions de détention mais aussi de travail pour les personnels pénitentiaires. « Les gens de la pénitentiaire ont besoin de considération. C'est un métier très dangereux. Les agressions, c'est une réalité », a réagi Michel Mercier à la sortie d'un entretien avec les syndicats. Plus tôt dans la matinée, un surveillant de la prison de Nanterre (Hauts-de-Seine) a été menacé de mort dans la rue par deux individus qui ont fait allusion à un détenu qui s'était pendu le 3 octobre avec son kit anti-suicide à Nanterre. Une thèse largement contestée par la famille. W. M.

Un rapport rédigé par plusieurs élèves de l'ENA, en 2010, chargés de réfléchir à la question des Droits des personnes détenues; j'ai été auditionné ce qui m'a permis de faire passer quelques idées et propositions, entre autres ma proposition de Loi portant création d'une procédure de suspension de détention provisoire pour raison médicale...je ne sais ce qu'est devenu ce rapport...

https://docs.google.com/document/d/1Sj23KktdhiUGaVGW9uhPaP3k3LGMsGPrLGrY3BJcIh4/edit

Allez un petit topo, très incomplet, sur la procédure de suspension de peine pour raison médicale!


LA SUSPENSION DE PEINE POUR RAISON MEDICALE

L’article 720-1-1 du code de procédure pénale, issu de la loi du 4mars 2002, dite loi KOUCHNER, voté dans un souci d’humanité, permet de suspendre une peine en cours d’exécution, dès lors que deux critères alternatifs sont remplis, savoir, soit, l’engagement du pronostic vital de la personne concernée, soit l’incompatibilité de son état de santé avec le régime ordinaire de détention.

Le texte, reproduit ci-dessous, a subi plusieurs modifications qui seront examinées en même temps que la problématique correspondante, savoir :

Loi du 12 décembre 2005 :
Examen du risque grave de renouvellement de l’infraction
Révocation de la suspension de peine en cas de non respect des obligations fixées par le jugement
Expertise médicale semestrielle pour les condamnés à une peine criminelle, destinée à vérifier si les conditions médicales sont toujours remplies.

Loi du 24 novembre 2009 « Loi Pénitentiaire » :
Possibilité ouverte d’accorder la suspension de peine, en cas d’urgence, si le pronostic vital est engagé, au vu d’un certificat médical rédigé par le médecin chef de la structure de soins dans laquelle la personne 
concernée est prise en charge.

A)    Le risque grave de renouvellement de l’infraction
Cette modification, introduite par la loi du 12 décembre 2005, (un essai avait été tenté durant les débats parlementaires de la loi du 9 mars 2004, PERBEN II, consistant à prendre en compte un éventuel trouble à l’ordre public) permet de refuser la suspension de peine en cas de risque de « renouvellement grave de l’infraction ».
Ce risque est évalué par une expertise psychiatrique ordonnée par le Juge de l’Application des Peines qui instruit la requête initiale.
La rédaction même du texte (La suspension de peine « peut » être accordée….) autorisait déjà le juge à refuser, en application du principe d’opportunité, la suspension de peine.
La jurisprudence antérieure à la loi du 12 décembre 2005 ou visant des situations antérieures à celle-ci (confer crim. 12 février 2003 affaire PAPON ; crim. 15 mars 2006) refusait de prendre en compte d’autres critères que ceux d’ordre strictement médicaux..
Il est néanmoins possible de considérer que, dans la mesure où les suspensions de peine qui sont accordées, concernent des personnes très gravement malades ou handicapées, cette condition devient relativement secondaire…mais elle existe.

B)     Quelle que soit la nature de la peine ou la durée de la peine restant à subir
Toute personne, dont la condamnation est définitive, peut demander la suspension de la peine qu’elle purge, sans condition de délai.

Néanmoins, la suspension de peine, pour être utile, doit concerner des personnes condamnées, non accessibles à une mesure de libération conditionnelle médicale, soit celles qui ne sont pas encore parvenues à mi peine ou subissent une période de sûreté.

En effet, pour les autres, il est préférable de privilégier une procédure de libération conditionnelle « classique », pour raison médicale, qui évite le suivi social et judiciaire « ad vitam aeternam » et le risque, pour les personnes condamnées à une peine criminelle, de voir leur suspension de peine révoquée, à l’issue de l’expertise semestrielle.

La suspension de peine, comme son nom l’indique, suspend l’exécution de la peine qui reprend son cours lorsque les conditions ne sont plus remplies.

Vision lamartinienne de l’application des peines « ô temps, suspend ton vol… ».

Donc, autant que faire se peut, nécessité de déposer une requête aux fins de libération conditionnelle médicale (article 729 du CPP), ce, d’autant plus que la loi du 24 novembre 2009 a introduit une possibilité pour les personnes condamnées, âgées de plus de 70ans, leur permettant d’obtenir une libération conditionnelle, sans condition de délai.

La libération conditionnelle présente l’avantage d’avoir une fin, celle de la peine ou des mesures en ce qui concerne les condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité.

Enfin, il est possible de demander la suspension de la peine avant même sa mise à exécution !

Cette possibilité avait été ouverte (mais non exploitée) par une circulaire de la direction des affaires criminelles et des grâces, signée JC MARIN (actuel procureur de la République près le TGI de PARIS), précisant que la suspension de peine visant l’incompatibilité de l’état  de santé avec la détention avait aussi pour finalité d’éviter une incarcération à ceux qui ne pourraient, d’évidence, pas la supporter.

La Chambre Criminelle de la Cour de cassation, par un arrêt du 21 février 2007 a jugé que la suspension de peine était accessible au condamné libre, quelque soit la durée de la peine à purger.

Le juge de l’application des peines doit être saisi sur le fondement des dispositions des articles 723-15 et suivants du CPP, concernant les aménagements de peine « ab initio », même si la peine à effectuer est supérieure à un an (deux ans depuis le  24 novembre 2009).

C)    Les critères de la suspension de peine

Ceux-ci doivent être établis par deux expertises aux conclusions (et non pas les constatations contenues dans le rapport ; crim. 27 juin 2007) concordantes.
La Chambre criminelle a estimé qu’il était possible de rejeter une demande de suspension de peine dès lors qu’une première expertise avait été déposée, dès lors qu’elle considérait qu’aucun critère n’était rempli. (Crim.23 juin 2004).


a)      Le pronostic vital engagé
La jurisprudence antérieure à  2005 n’exigeait pas de définir le délai de « réalisation » du pronostic vital (court, moyen ou long terme).
La chambre criminelle, par un arrêt en date du 28 septembre 2005 (AJ PENAL 2005 461), exige  désormais que le pronostic vital soit engagé à court terme. (voir aussi : crim 4 octobre 2006 AJ PENAL 2007 40).
Néanmoins, cette exigence n’est plus retenue lorsque, par ailleurs, les experts, de façon concordante, estiment que l’état de santé est incompatible avec la détention (crim. 15 mars 2006), s’agissant du second critère alternatif.
La chambre criminelle reste, en réalité, sur son exigence de l’engagement à court terme du pronostic vital et, dans l’espèce qui lui était soumise, n’a pris en compte que l’incompatibilité de l’état de santé avec la détention.

b)      Incompatibilité de l’état de santé avec la détention

Ce second critère, depuis l’arrêt du 28           septembre 2005, restreignant les cas d’admission sur le fondement du premier critère, est de plus en plus souvent invoqué.
L’état de santé de la personne concernée doit être incompatible :
Ø  Durablement
Ø  Avec la détention ordinaire
Durablement : il doit s’agir de pathologies « installées »

Avec la détention ordinaire
L’état de santé de la personne condamnée doit être incompatible avec le régime de détention de l’établissement pénitentiaire où il se trouve (maison d’arrêt ou établissement pour peine), pour y purger une peine.
Ceci exclut de fait les établissements destinés à les héberger temporairement pour y recevoir des soins, tels que les U.H.S.I. !
Pourtant, de nombreuses juridictions d’application des peines rejettent des demandes de suspension de peine au motif que la proximité d’un tel établissement dans lequel la personne peut être transférée, permet de rendre son état de santé compatible !
Il est constant que les U.H.S.I ou l’hôpital pénitentiaire de FRESNES n’ont pas vocation à recevoir des condamnés pour y purger leur peine ; donc, par conséquent, ne peut être pris en compte que le régime ordinaire de détention pour déterminer la compatibilité de l’état de santé.

Dans un arrêt en date du 7 janvier 2009, concernant une demande de suspension de peine déposée par un condamné atteint de paraplégie, dont les experts avaient considéré qu’outre l’absence d’engagement du pronostic vital, son état de santé était compatible avec le maintien en détention, la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation a considéré :
« Mais attendu qu’en se prononçant ainsi sans rechercher, comme l’y invitaient les conclusions du demandeur, s’il ne résultait pas des deux expertises que les conditions effectives de sa  détention étaient durablement incompatibles avec son état de santé, la chambre de l’application des peines n’a pas justifié sa décision au regard des dispositions de l’article 720-1-1 du code de procédure pénale ».

La question du handicap
Un nombre sans cesse croissant de personnes âgées (parfois très âgées) sont détenues, souffrant de   multiples pathologies mais aussi de handicap moteur et, très fréquemment, de sénilité.
Contre toute attente, il arrive que les experts qui les examinent, considèrent, que, nonobstant ces handicaps, pourtant réellement invalidants, leur état de santé est compatible avec la détention !

Solution : obtenir une contre expertise ou un complément d’expertise, dans l’hypothèse où le juge ne l’ordonne pas lui-même.

Quid ?

Le texte ne prévoit pas cette possibilité de droit.

Le fondement juridique doit donc être recherché dans les pouvoirs généraux des juridictions d’application des peines, évoqués par les articles 712-16 ou D 527 du code de procédure pénale, relatifs aux pouvoirs des juridictions saisies ou de leurs présidents.

Il n’en demeure pas moins que le juge n’est pas lié par une telle demande qu’il peut rejeter.

Néanmoins, en cas de contradiction, même si la jurisprudence permet le rejet de la requête en suspension de peine, de nombreuses juridictions ordonnent, soit des contre expertises, soit des compléments d’expertises.
Le Juge tiendra compte de la troisième expertise ou du complément, s’il vient modifier la ou les expertises initiales et aboutit à ce qu’un ou deux critères soient remplis (crim. 14 octobre 2009 AJ PENAL 2010 42).
Le juge a aussi la possibilité de statuer outre les conclusions des expertises en se fondant sur d’autres éléments du dossier : certificats médicaux, par exemple.

La loi du 24 novembre 2009 a rajouté une possibilité d’octroi de la suspension de peine, en cas d’urgence, au vu d’un certificat médical délivré par le médecin chef de la structure dans laquelle la personne concernée est prise en charge, lorsque le pronostic vital est engagé.

Cette nouvelle possibilité, qui concernera, en réalité, les personnes arrivées à la dernière extrémité (notion d’urgence),  permet de passer outre, en théorie (nous verrons l’application qu’en feront les juridictions d’application des peines), les conclusions des expertises.

L’expérience démontre que les experts choisis, le plus souvent, raisonnent « in abstracto », sans connaître les conditions effectives dans lesquelles vivent les personnes qu’ils examinent ; il en résulte fréquemment des conclusions tendant  à la compatibilité de l’état de santé avec la détention au seul motif que des soins sont administrés par l’U.C.S.A. de l’établissement pénitentiaire ou au sein d’une U.H.S.I. ce qui rend possible une incarcération « pour aller au bout de la peine ».

Enfin, sont souvent désignés des experts non spécialistes des pathologies dont souffrent les personnes détenues ce qui aboutit à une minoration de la gravité des situations.

Ainsi, s’agissant des personnes âgées et/ou handicapées, il est fondamental de prendre en compte la question de la dépendance dans les actes de la vie quotidienne : toilette, préparation des repas, alimentation, déplacements en détention, fréquentation de la cour de promenade, ménage de la cellule, occupations durant la journée, aide d’un co détenu, etc…

Il est possible de demander un complément d’expertise afin de vérifier le degré de dépendance du requérant.

Le projet de sortie
Même en supposant que les conditions médicales soient remplies, toute demande de suspension de peine doit comporter un projet de sortie, essentiellement en termes d’hébergement.

Or, le plus souvent, ce point pêche cruellement, en ce sens que les personnes condamnées, souvent âgées, n’ont aucune famille et ne peuvent plus intégrer des foyers de réinsertion qui leur sont en tout état de cause, fermés, n’étant pas conçus pour héberger des pensionnaires atteints de pathologies souvent graves ou présentant de lourds handicaps.

Le Tribunal de l’Application des Peines de CRETEIL, dont le rôle est surchargé de demandes de suspension de peine émanant, soit de l’hôpital de FRESNES, soit du Grand Quartier de la maison d’arrêt, a imaginé d’admettre les requérants au bénéfice de la suspension de peine, lorsque les conditions sont remplies,  et de suspendre la mise à exécution de celle-ci à l’obtention d’un hébergement. (TAP CRETEIL 24 octobre 2006 ; jurisprudence constante dans le ressort de cette juridiction).

Dès que la condition est réalisée, par Ordonnance, le JAP met en application la suspension de peine.

Un problème lancinant et récurrent : l’absence d’hébergement.

Un raisonnement a été tenu, consistant à invoquer le principe de continuité des soins (figurant dans le Code de la Santé Publique aux articles L 6112-1 et 2) en application duquel l’hôpital qui soigne, au sein de l’Unité de Consultation et de Soins Ambulatoires (U.C.S.A.), doit également soigner à l’extérieur les personnes qui lui sont confiées.

Devant le refus opposé par l’Assistance Publique Hôpitaux de Paris à la demande d’une personne âgée détenue à Fresnes, admissible à une suspension de peine et en faveur de laquelle les experts préconisaient une admission dans une maison de retraite médicalisée, une procédure de référé suspension a été introduite devant le Tribunal Administratif de PARIS (L 521-1 du Code de justice administrative)

Par une ordonnance en date du 13 juin 2007,(AJ PENAL  le Président du Tribunal Administratif de PARIS, considérant que l’AP-HP était débitrice d’une telle obligation, lui a enjoint d’orienter le requérant vers une structure adaptée à son état de santé.
« Considérant qu’en vertu de l’article L 6112-1du code de la santé publique, le serive public hospitalier assure, dans des conditions fixées par voie règlementaire, les examens de diagnostic et les soins dispensés aux détenus en milieu pénitentiaire et, si nécessaire, en milieu hospitalier, : qu’aux termes de l’article D 368 du code de procédure pénale : «  les missions diagnostic et de soins en milieu pénitentiaire et la coordination des actions de prévention et d’éducation pour la santé sont assurées par une équipe hospitalière placée sous l’autorité médicale d’un praticien hospitalier, dans le cadre d’une unité de consultation et de soins ambulatoires, conformément aux dispositions des articles R 711-7 à 711-18 du code de la santé publique. En application de l’article 711-7 du code de la santé publique, le directeur de l’Agence Régionale de l’Hospitalisation désigne, pour ch           aque établissement  pénitentiaire de la région, l’établissement public de santé, situé à proximité de l’établissement pénitentiaire, qui est chargé de mettre en œuvre les missions décrites au premier alinéa du présent article ».Qu’enfin, en vertu de l’article L 6112-2 du code de la santé publique, les établissements hospitaliers « sont ouverts à toute les personnes dont l’état de santé requiert leurs services. Ils doivent être en mesure de les accueillir de jour et de nuit, éventuellement en urgence, ou d’assurer leur admission dans un autre établissement…ils dispensent aux patients les soins préventifs, curatifs ou palliatifs que requiert leur état et veillent à la continuité de ces soins, en s’assurant qu’à l’issue de leur admission ou de leur hébergement, tous les patients disposent des conditions d’existence nécessaires à la poursuite de leur traitement. A cette fin, ils orientent les patients sortants ne disposant pas de telles conditions d’existence vers des structures prenant en compte la précarité de leur situation ». Que ces dispositions mettent à la charge de l’A.P.-H.P. dont dépend l’Unité de Consultation et de Soins Ambulatoires du CHU de BICETRE, chargée de soigner les détenus de la maison d’arrêt de FRESNES, l’obligation de veiller à la continuité des soins assurés à Monsieur X par cette UCSA ; que si l’AP-HP fait valoir que l’état de Monsieur X ne nécessité pas d’hospitalisation, il lui appartient néanmoins d’orienter ce patient vers une structure adaptée à son état ».

La situation a pu ainsi, être débloquée et la personne accueillie dans une maison de retraite, sachant que l’exécution de la décision a été « biaisée » par les travailleurs sociaux de l’AP-HP qui ont renvoyé vers leur homologue de l’hôpital de FRESNES qui a finalement trouvé une place.

Néanmoins, le principe est posé et peut être repris en province, à l’encontre des Agences Régionales d’Hospitalisation qui disposent du pouvoir d’orienter un malade vers un établissement de soins.

La révocation de la suspension de peine

Une suspension de peine, en l’état de la loi, peut être révoquée par le JAP ou le Tribunal de l’application des peines, soit dans l’hypothèse où les conditions médicales (expertise semestrielle pour les peines criminelles, à l’initiative du JAP dans les autres cas) ne seraient plus réunies soit pour manquement aux obligations fixées par le jugement d’octroi.

En aucun cas, une suspension de peine ne peut être révoquée pour mauvaise conduite ou commission d’une infraction durant la suspension.

En effet, l’article D 49-25 du CPP, relatif aux pouvoirs généraux du JAP de révoquer une mesure d’aménagement de peine, renvoie, in fine, à la procédure initialement utilisée pour octroyer la mesure

Or, cette possibilité n’est pas prévue par l’article 720-1-1 (interprétation stricte du texte).

CHAP PARIS 22 mars 2007 (CHARTIER) ; AJ PENAL 2007, 235 :
« …la mesure de suspension de peine pour raison médicale issue de la loi du 4 mars 2002, devenue l’article 720-1-1 du code de procédure pénale, ne comportait pas, à l’origine, des dispositions concernant les conditions dans lesquelles elle pouvait être retiré, la loi du 4 mars 2004, entrée ne vigueur le 1er janvier 2005, y ajoutant, a prévu que le juge de l’application des peines peut, à tout moment…ordonner qu’il soit mis fin à la suspension de peine si les conditions de celle-ci ne sont plus remplies et qu’il en est de même si le condamné ne respecte pas les obligations qui lui ont été imposées, en application des dispositions de l’article précédent ».
«…un simple décret qui est entré en vigueur en même temps que la loi ne saurait créer une condition de retrait supplémentaire, à savoir une mauvaise conduite, pour combler un soit disant vide juridique, ou une lacune de la loi »
« Dès lors, la mesure de suspension de peine ne saurait être retirée sur le fondement de l’article D49-2 du code de procédure pénale ».

Un rapport particulièrement intéressant contenant une évaluation du dispositif d'hospitalisation en soins somatiques des personnes détenues.



Evaluation du dispositif d’hospitalisation en soins somatiques des personnes détenues

MARSALA Vincent , PAUTRAT Catherine , FRANCE. Inspection générale des affaires sociales ; FRANCE. Inspection générale des services judiciaires
L’Inspection générale des affaires sociales et l’Inspection générale des services judiciaires ont été saisies d’une demande de mission conjointe sur la place effective des Unités Hospitalières Sécurisées Inter régionales (UHSI) dans le recours aux soins des personnes détenues, leur complémentarité avec les autres structures d’hospitalisation des personnes détenues et l’évolution éventuelle à prévoir du dispositif actuel. Le présent rapport rappelle tout d’abord la réforme introduite par la loi du 18 janvier 1994, décrit le dispositif d’hospitalisation des personnes détenues mis en place par le niveau national puis dresse un bilan de celui-ci. Enfin, ce rapport fait des préconisations visant à adapter ce dispositif et améliorer son fonctionnement dans un souci de meilleure réponse aux besoins des personnes détenues, et de plus grande efficience.


http://www.igas.gouv.fr/spip.php?article226

Un des deux critères alternatifs à partir duquel se décide une suspension de peine pour raison médicale réside dans la compatibilité de l'état de santé du requérant avec la détention ordinaire; le juge est sensé examiner "in concreto" quelles sont les condition de détention effectives de la personnes concernée et si elles diffèrent sensiblement des conditions de détention "ordinaires" visées par le texte.

Cette question,  depuis la mise en place des Unite Hospitalières Sécurisées Interrégionales, dites "U.H.S.I." (sans parler des UHSA) est devenue aigüe.

En effet, comment parler de conditions de détention ordinaires lorsque la personne, gravement malade, est hospitalisées très fréquemment, moyennant des transferts épuisants, vers l'UHSI la plus proche?

La tentation est grande de poursuivre l'exécution de la peine envers et contre tout, en prolongeant le patient détenu qui devient plus un patient qu'une personne détenue, jusqu'au bout de la peine.

Où est le sens de celle-ci?

J'ai vu des Juges de l'Application des peines refuser une suspension de peine au motif que le requérant était régulièrement pris en charge par l'UHSI (celle de Marseille, pour citer un exemple).

Heureusement, s'agissant de cet exemple marseillais, les juges d'appel ont considéré que l'on s'écartait des conditions de détention ordinaires et que les conditions de détention effectives de mon client exposaient celui-ci à un niveau de souffrance excédant largement celui inhérent à toute privation de liberté; la suspension de peine pour raison médicale a donc été ordonnée , en  infirmant le jugement.


jeudi 27 octobre 2011

Intervention lors d'un colloque organisé le 23 mai 2007 par l'Université de ROUEN au sujet des dossiers judiciaires de personnalité ;cet article ainsi que toutes les autres contributions a été publié, en 2010, aux presses Universitaires de Rouen et du Havre sous le titre "Sous l'oeil de l'expert"


Quitter la prison : le poids du dossier personnel

 dans la procédure de libération conditionnelle

Une condamnation à une longue, voire très longue peine, c’est un voyage au long cours ; dans le cas des condamnés à perpétuité, il s’agit d’un voyage dont on ne connaît pas la fin, l’issue…

Les condamnés à perpétuité, par définition, ne connaissent pas la date de la fin de leur peine.

Certains d’entre eux, incarcérés très jeunes, passeront la fin de leur adolescence, leur vie d’homme jeune, puis d’homme mûr, en détention.

Certains d’entre eux ont entendu l’Avocat Général réclamer contre eux la peine de mort…et, parfois, ils regretteront qu’elle n’ait pas été prononcée !

A un certain moment, se posera la question de leur sortie de prison, après vingt années, voire beaucoup plus…

Leur parcours carcéral sera étudié ; il constitue un des éléments sur lequel se fondera la décision accordant ou non l’aménagement de peine.

Cette étude se fera à partir du dossier personnel

Le dossier personnel : notion mouvante, multiple : il n’y a pas de dossier type

Il existe d’ailleurs plusieurs dossiers : celui de l’administration pénitentiaire, celui du Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation, et, enfin, celui du Juge d’Application des Peines, supposé être la synthèse des deux premiers.

Par ailleurs, la longueur de la peine n’est pas obligatoirement synonyme de gros dossier.

Tel condamné à perpétuité, (condamné pour une tentative de viol et de multiples vols de voitures !!!), ayant déjà bénéficié d’une libération conditionnelle, révoquée peu de temps après et bénéficiaire d’une seconde mesure, semble avoir traversé toute sa détention et…près de trente années de sa vie, inconnu de l’administration pénitentiaire !

Son dossier ne comprenait que l’arrêt pénal de la Cour d’Assises et deux vagues expertises psychiatriques de l’époque des faits ainsi qu’une tentative de synthèse socio éducative de l’époque de sa première libération conditionnelle !

De même, le dossier de tel autre condamné à perpétuité, après quinze années révolues de détention, est quasiment vide, à l’exception d’une expertise psychiatrique, fort heureusement récente.

Une certitude : passé le Centre National d’Observation, le condamné à perpétuité traverse une période d’oubli total !

Seule solution pour vaincre cet oubli : créer des incidents en détention, mieux, tenter de s’évader : là, il deviendra D.P.S. et sera l’objet de toute la sollicitude sécuritaire de l’administration pénitentiaire !

Car il faut le savoir : les incidents en détention sont minutieusement répertoriés et suivent le condamné dans son parcours carcéral ; parfois, il faut parler de tour de France carcéral !

Plus le condamné fera parler de lui, plus souvent il sera transféré, à la demande des surveillants qui disposent, ici, d’un réel pouvoir.

Un facteur important à relever : la question de la santé apparaît progressivement dans les dossiers…jusqu’à, parfois, justifier une suspension de peine pour raison médicale.

La majorité des personnes incarcérées sont issues de milieux défavorisés, ont connu des conditions de vie difficiles, souvent l’alcoolisme ; leur état de santé est souvent dégradé à l’orée de leur incarcération.

Les conditions de vie en détention, l’inactivité, l’horizon très limité, l’alimentation peu équilibrée liée au manque d’exercice physique, provoquent des maux spécifiques : diabète, obésité morbide, cardiopathies etc…

Le dossier personnel proprement dit

Le dossier pénitentiaire «ordinaire », sur lequel les acteurs du projet de libération conditionnelle travaillent, se décompose ainsi :

  • Pièces de la procédure initiale : arrêt (s) de condamnation ; réquisitoire de renvoi (jamais de pièces à décharge !) ; expertises psychiatriques et/ou psychologique ordonnées par le juge d’instruction.
  • Cote C.N.O. (le cas échéant) : résultat des tests passés durant cette période, synthèses des surveillants etc…
  • Incidents disciplinaires
  • Vie en détention, parcours carcéral : suivant les transferts, le dossier est communiqué au JAP désormais compétent ; il s’enrichit donc au fur et à mesure (ou il est sensé l’être ; confer supra)
  • Cote aménagements de peine : si une requête a été déposée dans le passé, voire une demande de commutation ; cette cote comprendra les éléments émanant de toute nouvelle procédure d’aménagement de peine.

Le dossier : reflet d’une évolution ?

Objectivement, oui, mais pas obligatoirement continue.

Evolution psychologique : apprentissage de la relation à l’autre, très carencée la plupart du temps

Très apprécié au moment où il s’agit de demander un aménagement de peine : évaluation du sentiment de culpabilité, avec quel intensité, quelle sincérité, depuis quand, stratégique ou non ?

Et surtout : désir de sortir

Ce dernier critère, le plus important en vue de la réinsertion, varie considérablement avec le temps.

Tel RCP, au moment de sa libération, pleurera amèrement ses copains de détention, voire ses potes surveillants, sa cellule !

Véritable spleen de la remise en liberté qui amène à s’interroger sur le sens de la peine !

Etait ce bien nécessaire de rallonger le temps d’épreuve des R.C.P. ?

Le dossier devrait permettre de mesurer la suradaptation carcérale.

Le condamné sur adapté ne pose aucun problème en détention, il se fond dans la masse : il est chez lui : « ma famille c’est, depuis longtemps, l’administration pénitentiaire » dira, au mois de juillet 2006, à son travailleur social, un condamné à perpétuité, détenu depuis le mois de novembre 1982.

Une constante des longues peines : absence de problèmes disciplinaires durant la période de condamnation ; par contre, l’angoisse de l’instruction, du jugement, voire les premiers temps après celui-ci, génèrent fréquemment des incidents disciplinaires, des passages au QD.

Par la suite, les RCP et très longues peines « gèrent » celle-ci… toujours la notion de long cours…

« Club » très fermé,  les RCP ne côtoient pas les autres condamnés.


JACKY

Né en 1947, condamné à la RCP en juin 1983, à l’âge de 36 ans, pour viol et homicide volontaire, détenu depuis le 16 novembre 1982, admis à libération conditionnelle le 4 avril 2006.

Le dossier comprend :

Les expertises ordonnées par le juge d’instruction, médico psychologique et psychiatrique, (à noter l’instruction très courte pour des faits commis en novembre 1982, procès d’Assises au mois de juin 1983 !)

Etat psychologique très fortement carencé, sur les plans affectif et éducatif, pupille de la nation peu ou pas d’activité professionnelle, uniquement en qualité de commis de culture, alcoolique…

Conclusion des experts chargés de la première expertise médico psychologique(trois pages) alors qu’il se trouvé détenu à la maison d’arrêt d’EPINAL :

« Individu totalement inadapté à la société, qui se marginalise…circonstance aggravante : il s’agit d’un violent et cette violence est peut-être conditionnée et certainement aggravée par l’éthylisme ».

Les experts psychiatres notent une absence de détérioration mentale y compris d’origine alcoolique, pas d’état dépressif ni d’éléments de type pervers.

Dossier CNO (quatre pages) : écrou du 31 janvier au 26 octobre 1984.

Les tests CNO font apparaître une personnalité frustre, disposant de peu de mots pour s’exprimer, revendicatif, état de santé moyen (édenté).

L’éducateur note une absence de parloirs et de correspondances, sa mère ignorant sa situation.

Jacky est proposé pour CLAIRVAUX où il est transféré le 24 octobre 1984.

Le dossier, pour la suite de la détention, est vide.

La fiche pénale nous apprend que Jacky sera ensuite transféré à MOULINS YZEURE le 5 juillet 1990, puis, le 10 décembre 1992 à SAINT MARTIN DE RE, à TOUL, le 19 février 1992, et, enfin, à VAL DE REUIL, le 21 août 2001.

A noter, de plus en plus fréquemment, de courts transferts à FRESNES, entre deux affectations puis, vraisemblablement, à l’Hôpital pénitentiaire.

Le parcours carcéral de Jacky est très difficile à appréhender, du fait de l’absence de documents et en raison d’une détérioration mentale (Halzeimher ?) qui lui interdit désormais de s’exprimer face aux intervenants et son Avocat.

Il est simplement possible de noter qu’il s’est vraisemblablement bien conduit, le JAP de LA ROCHELLE lui ayant accordé à trois reprises des réductions du temps d’épreuve, pour un total de 225 jours.

JACKY ne sollicitera une libération conditionnelle qu’au mois de mars 2003, soit après dix neuf ans et quatre mois de détention, alors qu’il était admissible à la libération conditionnelle depuis plus de quatre ans.

Il s’agit déjà d’un phénomène de suradaptation à la prison.

Les surveillants, sollicités pour l’élaboration d’une synthèse, dans le cadre des procédures de libération conditionnelle, indiquent :

Détenu calme et âgé, hygiène douteuse, voire inexistante, cellule vide, non entretenue où il ne reste que pour dormir (absence de lieu de vie privée), coupé de toutes relations avec l’extérieur, oisif, traînant dans les couloirs, et, surtout : proche d’un co détenu qui le fait manger

En résumé, JACKY, dans une situation de réelle précarité, s’est plus ou moins clochardisé en détention !

La libération conditionnelle sera accordée à la seconde tentative, sachant que dans la première procédure, JACKY aura bénéficié de deux permissions de sortir avant de voir sa LC infirmée en appel.


PASCAL

Né en mai 1960, condamné à  douze années de RC, puis à la RCP, assortie d’une période de sûreté de 18 années, en mars 1986 ; détenu depuis le 1er août 1983 ; admis à la LC le 3 décembre 2004 par la JNLC, après 21ans et 5 mois de détention.

Il s’agissait de sa première requête, ce, dans la mesure où, ayant pris conscience de sa responsabilité, il ne s’autorisait pas à solliciter « cette mesure de faveur » (dixit PASCAL à un expert psychiatre).

Dossier inexistant excepté les pièces de procédure et les expertises mentales.

Celles-ci, comparées à celles, nombreuses, ordonnées par le JAP, permettent de constater une transformation radicale du comportement.

Acquisition du sens social, de la relation à autrui, par le travail, la formation professionnelle.

Acquisition d’un véritable savoir faire dans les métiers de l’audio visuel, au sein de la centrale de SAINT MAUR, dès1991 : copiage et duplication d’archives sonores pour le compte de l’INA, expérience poursuivie à la centrale de POISSY, où il obtiendra sa libération conditionnelle.

A l’époque des premiers faits, PASCAL avait déserté de la légion étrangère ; il vivait en autarcie, de vols multiples, dans la forêt, afin d’échapper aux poursuites, suite à un premier crime (coups mortels) ; il a surpris deux randonneurs, craignant qu’ils ne le dénoncent, il les a assassinés.

Recueilli par une personne avec laquelle il se liera d’amitié, il la tuera également, craignant d’être dénoncé par elle.

Les experts le considèrent, en 1983, comme immature, inadapté à la vie en groupe et à un cadre social structuré, autant de perturbations psychopathiques graves de la personnalité.

Anxiété totalement investie dans l’agressivité ; le passage à l’acte dénoue les tensions internes et les conflits avec autrui.

Le geste criminel, au lieu de l’accabler, l’apaise.

A noter que, lorsqu’il sera arrêté, après trois assassinats succédant à un premier crime ‘coups mortels) et de longs mois de cavale, il se dira soulagé.

Il est considéré, en 1983, comme étant dangereux (notion d’état dangereux).

Les experts, appelés à se prononcer sur la réadaptibilité, considèrent que PASCAL devra passer par une dépression, entraînant une demande de soutien psychologique (indépendamment de la gestion interne de la détention).

« Cette action vise à ce que le sujet trouve progressivement en lui-même des possibilités de résistance à l’abandon et à l’angoisse qui lui permettent d’élaborer pour lui-même une maturation de ses positions existentielles et affectives ».

Les experts désignés tant par le JAP que par la J.R.L.C. de VERSAILLES, concluent, pour leur part :


Rapport d’étape du Docteur FRANCO (septembre 2002)

Maturation depuis les faits

L’état de dangerosité semble complètement en voie de disparition

L’action psychothérapique est moins difficile ; il en est demandeur

Rapport du Docteur SINAI (juin 2003) :

A noter ce qu’il déclare à l’expert : aucun souvenir des six ou sept premières années passées en prison.

Evolution manifestement positive ; il a tiré partie de sa formation professionnelle valorisante

Les faits sont intégrés comme faisant partie de sa propre histoire

Acquisition d’une meilleure image de soi : plus rien à voir avec celle qu’il avait de lui-même à l’époque des faits : dégradée, moi sous jacent etc…

Nouvelle image forgée grâce au travail remarquable accompli en détention.

Acquisition du sentiment de culpabilité

Absence de dangerosité

PASCAL est susceptible de se réadapter s’il bénéficie d’un encadrement suffisant, à l’aide de mesures socio judiciaires (ce qui fut fait dans le cadre du projet de sortie).

Rapport du Docteur ZAGURY (mars 2004)

Evident mouvement maturatif : desperado, à l’époque des faits, en quête permanente d’une position de force et d’emprise, puis, dans un deuxième temps, démarche affective de type autopunitive : de dominant, il devient soumis ; enfin, dans un troisième temps, ouverture vers les autres (1991: formation à SAINT MAUR ?), empathie, passion de son métier etc…

Discours authentique, sincère ; il ne se cherche aucune excuse.

Le sujet ne présente pas de dangerosité criminologique, les modifications en profondeur de son fonctionnement mental devraient lui permettre d’affronter les aléas relationnels et professionnels qu’il rencontrera nécessairement.


PASCAL est l’exacte antithèse de JACKY : pourtant, le passif, antérieur à l’incarcération, est aussi lourd.


FREDERIC

Frédéric, né en 1971, condamné à vingt années de RC en décembre 1994, avec une sûreté de la moitié ; détenu depuis 1992, admis à la LC en janvier 2003 à sa première requête.

De loin, le dossier le plus complet.

Frédéric a été détenu :

  • A Fresnes de décembre 1992 à mars 1993
  • A Osny (95) de mars 1993 à février 1993
  • A Fresnes de février 1993 à septembre 1997 : admis au CNO le 30 juin 1996                           
  • A Val de Reuil de septembre 1997 à juin 2001
  • A Amiens de juin 2001 à de juin 2001 à janvier 2002
  • A Clairvaux de janvier 2002 à la LC.


Le dossier comprend une cote C.N.O. très complète  permettant une approche de ses conditions de vie familiales, qualifiées de désastreuses : famille éclatée, placement en foyer, père, alcoolique, incarcéré pour inceste.

Il souffre de graves déséquilibres psychologiques et somatiques (alcoolisme, toxicomanie) ; de plus, il n’a jamais travaillé et a mené une vie d’errance depuis son enfance.

Les tests CNO sont positifs ; il est noté comme étant en voie de stabilisation sur le plan psychologique : une réflexion naît, tant sur sa place dans la société que sur sa responsabilité pénale ; sentiment de culpabilité…
Il veut reprendre (débuter ?) des études et passer des diplômes…avant d’entamer une formation professionnelle.

Le surveillant orienteur propose de faire le point dans deux ans concernant cette dernière question….nous sommes en 1996.

Le psychiatre, chargé du bilan médico psychologique préconise, au vu du tableau de personnalité, un milieu pénitentiaire « bien structuré et contenant au plan psychique » !!

Ils ne le sont pas tous ?

Le surveillant prévoit : « …sa détention sera probablement parsemée d’incidents. Il recherche ses droits mais oublie les obligations, sera certainement contestataire ».

Une affectation en maison centrale est préconisée par le surveillant orienteur ; le directeur du CNO, quant à lui, estime adapté une prise en charge à VAL DE REUIL : ce sera VAL DE REUIL, un centre de détention…avant un transfert en centrale, à  CLAIRVAUX.

Durant da détention, Frédéric va totalement se transformer ; à VAL DE REUIL, il va se mettre à l’écriture grâce à la relation qu’il va nouer avec une jeune femme qu’il contacte par une petite annonce « détenu cherche plume facile pour relation légère ».

Cette relation, au départ, épistolaire et amicale, va se transformer pour devenir une relation amoureuse.

Frédéric va rencontrer Mme X au parloir, à VAL DE REUIL, puis à CLAIRVAUX.

Sur le plan du comportement en détention, comme l’avait pressenti le surveillant orienteur au CNO, Frédéric va se montrer indiscipliné, de nombreux rapports d’incidents étant dressés à son encontre.

De même, il va prendre des risques pour faire respecter les droits des détenus.

Ainsi, à CLAIRVAUX, il va participer et, même, mener, un mouvement collectif (refus de réintégration les cellules) protestant le cryptage des films X diffusés par CANAL +.

Cette revendication a dû être jugée suffisamment crédible pour qu’un courrier soit envoyé par la direction à CANAL + afin de remédier au problème.

Frédéric et les autres détenus n’ont pas été inquiétés.

bl’administration pénitentiaire soit à sa demande, à AMIENS, VAL DE REUIL et CLAIRVAUX.

Il va se marier en détention.

Son épouse viendra le voir au parloir, à VAL DE REUIL puis à CLAIRVAUX.

Ils vont connaître les contraintes du parloir, les frustrations, l’obligation de vivre une sexualité quasi clandestine.

Un incident va survenir le 11 novembre 2002, durant un parloir.

Les deux époux, les parloirs étant tous complets, vont devoir se réfugier dans une salle située juste à côté, dans laquelle se trouve une machine à café.

Ils vont se retrouver et avoir une relation sexuelle.

Les surveillants, non seulement, ne sont pas intervenus, mais, prétextant le fait d’aller chercher un café, ont observé la scène et se sont moqués.

Frédéric est intervenu après, en manifestant sa colère ; les surveillants le menaçant, en cas de récidive, de dresser un rapport d’incident.

Cet incident a été porté à la connaissance du JAP qui adressé un courrier au directeur de la centrale afin de faire part de son étonnement et rappeler à l’ordre l’administration pénitentiaire afin que soit respectée l     a dignité des détenus.

A noter que les parloirs intimes, en l’absence d’U.V.F. font l’objet d’une tolérance variable selon les établissements.

Le directeur, en réponse, dressera un portrait de Frédéric, insistant sur son caractère rétif :

« Instigateur d’un mouvement de contestation…détenu au comportement agressif, il est avant tout en lutte permanente contre le système, il compte mener, dès que l’occasion s’en présente, un combat pour la libéralisation du système carcéral telles que les portes ouvertes, les parloirs intimes etc…

Me concernant, je doute d’une bonne évolution de sa part et je suis à des  lieues de lui accorder la moindre parcelle de confiance ».

Une réflexion : vaut il mieux un détenu revendicateur, quine considère pas la prison comme son univers unique ou un détenu suradapté au milieu carcéral ?

Au regard de la réinsertion, il apparaît très préférable de ne pas s’habituer à la détention, d’être toujours en lutte contre le système.

En définitive, malgré les apparences, malgré son image de contestataire, les rapports d’incidents, l’absence totale de confiance de la part du directeur de la maison centrale, Frédéric obtiendra sa libération conditionnelle dès sa première requête !!

Ici, le dossier aura eu un poids important dans la décision, mais un poids « positif », à côté d’autres éléments : son couple, la personnalité de son épouse et, bien sûr, son projet de sortie.